samedi 24 décembre 2011

Autorisez-vous à faire l’âne avec Dieu !


Etes-vous tendance ? Vous savez que Dieu est désormais tendance au moins selon le Point… On nous l’avait annoncé mort avant de savoir qu’il était malade et voilà qu’il reviendrait à la mode. Pauvres de nous, pauvre de lui.
Mais, ce matin, alors que je confessais dans cette église, une jeune mariée de l’été dernier m’annonçait par SMS qu’ils attendaient un enfant pour le mois d’août, elle était ravie de mettre dans la confidence et moi je ne vous dis pas ! Les mots semblent bien petits pour exprimer la réalité profonde de la parole que cet homme et cette femme ont échangée. Voilà que cet échange donne naissance à quelqu’un, quelqu’un d’autre : magnifique Noël d’ouverture.
Chaque année nous passons ainsi de paroles creuses ou de circonstances, de paroles de bon ton aux paroles fortes qui construisent nos vies, des paroles qui fondent nos existences personnelles familiales, collectives.
Je vous propose en cette nuit d’accueillir la bonne nouvelle de Noël comme cette tentative ultime de Dieu à travers l’histoire humaine de nous adresser une parole vraie, une parole forte, une parole qui fonde nos vies. Dans la lettre aux Hébreux les premiers chrétiens ont ainsi accueilli le mystère de Noël : « Souvent, dans le passé, Dieu a parlé à nos pères par les prophètes sous des formes fragmentaires et variées ; mais, dans les derniers temps, dans ces jours où nous sommes, il nous a parlé par ce Fils qu'il a établi héritier de toutes choses et par qui il a créé les mondes. »
En cette fête en cette nuit, en ce moment, Dieu nous adresse une parole directe et cette parole c’est son fils né de Marie. Oui « le Verbe c’est fait chair » nous dit l’évangéliste saint Jean. Oui la parole de Dieu prend corps ! Il ne s’agit pas simplement de s’interroger sur l’existence ou la non-existence de Dieu, il s’agit d’accepter le dialogue que Dieu nous propose par la venue de cet enfant, dans ce temps de l’histoire, dans ce lieu précis de notre planète.
La parole, la conversation, la communication voilà qui est tout à la fois humain et divin.
Nos mots engagent, font mal, déroutent, blessent, réjouissent, apaisent, tuent ; on se fait piéger par nos bons mots, notre humour ; on est pris au mot. Quand Dieu prend la parole c’est quelqu’un, c’est Jésus de Nazareth, c’est une parole vraie qui engage l’avenir, une parole qui donne vie, c’est une parole où tout la personne est concernée. Oui, tout l’être de Dieu est concerné par cette parole qu’est l’enfant de la crèche. Les amoureux pressentent cela, le prêtre au jour de son ordination, le religieux ou la religieuse au jour de ses vœux. Chacun de nous, à chaque messe, le croit quand il entend la parole qui engage totalement le Christ dans le corps livré et le sang versé.
Qu’est-ce qu’il nous dit dans cet enfant qui ne peut encore prononcer les mots des hommes :
Dieu n’est pas dangereux, ce Dieu-là n’est pas fauteur de guerre, il n’est pas barbu comme un père Noël, il n’est pas donneur de leçon puisqu’il n’a encore que des vagissements de nourrissons. N’ayez donc aucune peur en vous, parlez à Dieu comme on parle à un enfant.
Dans cette parole qu’est l’enfant Jésus Dieu fait de la faiblesse son point fort, loin de la crèche les images redoutables de la puissance ; renoncez à toute puissance sur vous, sur les autres, il n’y a que la bonté et la beauté qui nous sauvent. Parlez-lui de vos faiblesses il sera en pays de connaissances et marchera avec vous.
Dieu fait éclore la joie dans les marges et non pas au centre de l’empire romain, à l’écart comme pour une confidence, sa naissance n’est proclamée que sur les toits des cieux et non sur les toits du monde. Elle n’est pas éclatante à la Jérusalem et à la Rome de ce temps-là. Ne regardez donc pas au centre des affaires, ne regardez pas votre nombril, regardez aux marges, au marginal, aux marginaux là où la vie se cherche un chemin pour éclore sans bruit. Parlez-lui de vos espérances, il en a pour l’univers entier et pour tous les hommes de bonne volonté.
Nous avons la fâcheuse habitude de nous parler, nous sommes si souvent en conversation avec nous-mêmes, nos pensées font en nous un bruit assourdissant. N’arrêtez pas de penser, ce n’est pas possible, quoiqu’on en dise, mais tourner vos pensées intérieures vers autre chose que vous-mêmes. Tourner vos pensées vers l’hôte intérieur. Finalement c’est nous la crèche ! Mais, si nous sommes la crèche, le lieu de naissance de Dieu, autorisez-vous à faire l’âne avec Dieu : c’est ce que l’on sait faire de mieux. Attention n’essayez pas de braire ça pourrait faire peur à l’enfant ; là dans la crèche, en vous, il a besoin surtout de chaleur humaine, ce lieu est si inhospitalier !
Oui Dieu a besoin de notre chaleur et tant d’être avec lui. Fournissez donc la paille !
Jean ROUET

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