Un film « eucharistique »
Je vais peu au cinéma. Trop peu à mon goût. Mais cette semaine j’ai eu la chance d’être invité à l’avant première du film de Xavier Beauvois relatant l’aventure des moines cisterciens de Tibhirine. Je ne sais de quels mots user pour vous encourager à aller voir ce film.
Ces huit moines se sont retrouvés dans la tourmente de la guerre civile en Algérie pendant les années 90 ; ils sont morts assassinés en mai 1996. Vivant au milieu d’une population littéralement terrorisée, ces hommes sont confrontés à un choix crucial. Doivent-ils partir pour fuir la menace ? Mais alors ils abandonneraient toute une population dont ils ont choisi de partager l’existence et qui les supplie de rester. Ou bien doivent-il rester en prenant le risque d’être exécutés ? Partir ce serait laisser les armes commander. Rester c’est risquer une mort quasi certaine. Mais pourquoi ? Au début du film, on comprend mal ce qui pousse ces hommes à rester quand la raison commanderait de quitter le pays. Au fil des images et des paroles, au fil des chants de ces moines, de leur prière, de leurs contacts avec les habitants du village on comprend peu à peu que leur choix de suivre le Christ en tout les conduit finalement à rester. Le bon pasteur n’abandonne pas ses brebis quand vient le loup.
C’est au terme d’un travail intérieur rude et déchirant, que ces hommes entrer finalement dans la liberté de Dieu ; ils ont vaincu la peur. Comme les hébreux passant la Mer Rouge, comme le Christ passant la mort, ils sont passés, eux aussi, et sont entrées dans la liberté. « Je ne crains pas la mort ; je suis un homme libre » : c’est ce que dit frère Luc, le frère médecin qui continue de soigner tous ceux qui se pressent à la porte du monastère ; y compris les terroristes qui, il le sait, sont ses futurs bourreaux. Voilà, en image, l’histoire vraie de ces hommes qui ont vécu l’Evangile jusqu’au bout : « aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous persécutent ».
Les éloges sur ce film sont quasi unanimes. Pourtant, peu de commentateurs ont su voir à quel point ce film nous place au cœur du mystère du Christ. Au fond, ce film est « eucharistique » : ces hommes sont morts par amour. L’eucharistie - comme l’histoire de ces moines - nous dit que le gagnant est celui qui a su donner, qui n’a pas eu peur de perdre. C’est celui qui donne sa vie qui entre dans la Vie. Ils sont morts et pourtant, ce sont eux qui ont vaincu.
Allez voir ce film ! Vous en sortirez à la fois éprouvés et grandis. Eprouvés car pendant deux heures, on suit pas à pas ces hommes face à l’épreuve. Grandis car leur histoire dit toute la grandeur de notre foi ; toute la beauté du chemin sur lequel Jésus-Christ nous appelle. Grandis aussi dans la découverte du mystère de l’eucharistie que nous célébrons ensemble tous les dimanche. L’eucharistie nous éprouve et elle nous grandit !
P. Pierre Alain LEJEUNE
1 commentaire:
Le film est plus complexe qu'une béatification cinématographique...Il ne s'agit pas d'en faire l'annexion... il pose aussi la question de la responsabilité des autorités algériennes, de la complexité des "terroristes" (sont-ils les tueurs, vraiment ?)
La simplicité des habitants du village aussi est touchante...
C'est aussi un film sur le doute, et la fidélité humaine, simplement humaine...
Enregistrer un commentaire